A douze ans, je rêvais de pratiquer le judo. Quelques années d’impatience plus tard, j’ai pu débuter avec un professeur du Collège des Ceintures Noires. Toutefois, mes fondamentaux professionnels naissent et se construisent avec la rencontre de Masamichi Noro, à qui je souhaite rendre hommage :
Noro Sensei était un créateur de mouvement avec des spirales sans cesse démontées et remontées. Il a ainsi perturbé toutes les techniques de l’Aïkido qu’il a faites siennes en les nommant « ma méthode, le Kinomichi ».
C’était un pédagogue particulier, un homme profondément gai, souriant et ouvert, heureux d’enseigner et de créer. Mais aussi un colérique quelques fois insupportable. Ses colères tragi-comiques, dignes des Nebuta, fêtes folkloriques d’Aomori (Nord du Japon), pouvaient laisser des traces, mais c’était son exutoire d’aventurier martial nippon.
C’était également un tendre, un charmeur, respectueux de la nature, des animaux, de tous les êtres, pourvu qu’ils bougent et cela m’avait vraiment impressionnée.
« Caressez l’espace !» disait-il sans cesse.
Avec lui, le mouvement devait “changer”, épouser les soubresauts des corps et de la vie. Nous bougions pour changer. Répéter un mouvement toujours identique pendant des années aurait pu me momifier. Avec lui, aucun risque : tout était changement et évolution. Ne fut-il pas sensei avant l’heure ?
Il m’accompagnera toujours.
Son dernier message fut « Gambate » qui signifie « Courage, allez-y, avancez ! ».
Tout mon enseignement a donc pris racines dans ce partage que je suis fière de porter dans ma pratique.